Modèles à impact : l’orée des nouvelles Trente Glorieuses ?
De 330 milliards aujourd’hui à 870 milliards estimés en 2025, chiffre qui s’avèrera probablement largement sous-estimé, le marché de l’Internet des Objets (IoT) est un excellent indicateur de l’évolution non seulement de la digitalisation mais bien plus largement de la place prise par la donnée dans notre société.
Nous sommes entrés dans l’ère de l’application : à l’image des grandes et petites inventions qui ont transformé notre rapport au monde, du container au courant alternatif en passant par le boulon, la data est aujourd’hui l’élément structurel sur lequel se construit notre (déjà si proche) société du futur.
Pourquoi aujourd’hui plutôt qu’hier ? Parce que le traitement de la donnée, hier encore spécifiquement dédié à certaines tâches, a désormais atteint un degré de développement suffisant pour être aisément associé à tous les aspects du monde qui nous entoure. Monde que nous pouvons rendre plus simple, plus intuitif et surtout réellement plus durable, aussi bien dans sa la dimension sociétale qu’environnementale.
C’est la conviction que je porte et mon attachement au développement de ces technologies, c’est aussi le reflet de l’évolution de notre échelle de valeurs, de cette idée selon laquelle la croissance ne peut plus se penser en vase clos, ne peut plus s’imaginer sans responsabilité. C’est tout le sens de ce que nous avons appris du traitement des données : loin d’en être l’opposée, la croissance est le reflet logique de la responsabilité.
La data permet de créer de la valeur économique, sociétale et environnementale
L’émergence de technologies de traitement de données toujours plus efficaces, dont l’intérêt massif pour l’IA représente aujourd’hui l’apogée, transforme la façon dont nous pouvons répondre aux problèmes. En analysant précisément chaque étape de la chaîne causale, nous pouvons identifier de manière précise et remédier aux disfonctionnements. Cette approche a ainsi permis d’identifier, au sein des 169 marqueurs listés pour atteindre les Objectifs de Développement Durable 2030, que l’IA pourrait permettre d’en atteindre 134, mettant en lumière la multiplicité d’application possible de la technologie.
De fait, au-delà de la dimension éthique si nécessaire au développement de la société, la persistance de ces inégalités représente un coût économique majeur pour le court comme pour le long terme. La mise en place de modèles plus inclusifs au sein des entreprises, à travers l’utilisation de la donnée, notamment en termes de diversité et de parité, a ainsi montré, logiquement, que ces entreprises accusaient de nettement meilleurs résultats, et j’ajouterais dans mon expérience, une capacité infiniment plus importante à innover et dépasser les cadres existants.
Cette même capacité à capter et analyser la donnée pour identifier les points de blocage et y remédier se retrouve de manière similaire dans la chaîne de production. En un an notre travail avec Birdz au sein de Nova Veolia nous a ainsi permis, grâce à l’utilisation de simples capteurs connectés au sein de l’infrastructure d’acheminement de l’eau, d’identifier et réparer plus de 1200 fuites, pour un volume d’eau économisé de plus d’1 million de mètres cube d’eau, expérience qui j’en suis persuadé deviendra dès demain la norme pour tous les acteurs de l’eau dans le monde.
En permettant de lutter contre les pertes, l’intégration de données environnementales et sociétales au sein de la chaîne de production améliore la rentabilité court et long terme tout en offrant un meilleur service. La réduction des coûts liés aux pertes, notamment des pertes énergétiques, ici l’eau mais tout aussi bien l’utilisation d’électricité grâce à des produits intelligents capable d’ajuster leur consommation, améliore la rentabilité à court et moyen terme, mais permet aussi de réduire le coût final pour les consommateurs tout comme plus largement le coût sociétal.
La data permet de développer un modèle capable de s’adapter aux chocs et fluctuations dans la préservation des ressources.
L’exemple de la rationalisation d’utilisation de ressources soulève aussi un autre aspect majeur de la donnée aujourd’hui : celui de la réactivité. Malheureusement largement mis en lumière par la situation sanitaire qui touche de plein fouet l’économie mondiale, les chocs externes peuvent non seulement impacter mais bien mettre à l’arrêt un secteur entier si la supply chain n’est pas suffisamment résiliente. Cette digitalisation nécessaire est le miroir de transformations structurelles dans l’approche économique : les entreprises doivent pouvoir s’adapter aux chocs certes, mais ceux-ci ne sont pas tous liés à des situations extraordinaires, le choc le plus courant est le plus simple, l’évolution de plus en plus rapide des attentes des consommateurs. Avec près de 60% des interactions clients maintenant digitales, chiffre qui ne cessera d’augmenter et qui englobe l’ensemble des secteurs, les entreprises ont non seulement besoin de proposer mais bien de maîtriser les outils digitaux pour offrir une expérience de plus en plus individualisée.
Ici l’exemple de l’infrastructure de transport, et particulièrement le travail effectué par Alstom depuis plusieurs années, symbolise bien cette nouvelle dynamique : rationaliser les coûts et s’adapter aux attentes des consommateurs.
En mettant un place un programme dédié, HealthHub, l’entreprise a pleinement intégré l’utilisation de la donnée comme clé d’une stratégie de rationalisation de la maintenance. Via l’utilisation de capteurs et de caméras, les équipes de techniciens ont développé des outils de suivi continu permettant une maintenance proactive, et in fine une large réduction de pannes et erreurs qui se retrouve dans la qualité de vie des usagers.
Aussi divers que soient ces exemples, ils ne représentent que quelques-uns des aspects que peut prendre l’utilisation de la donnée. Du développement de la smart city à travers les feux de route intelligents permettant la décongestion urbaine jusqu’à l’agriculture connectée avec l’analyse des données atmosphériques et géologiques pour favoriser une agriculture durable, l’utilisation de la donnée ouvre une infinité de de voies d’exploration, de capacité à innover et améliorer.
Un impact construit sur la confiance
Est-ce à dire cependant que ce modèle est facile à mettre en place ? S’il repose sur une logique simple, plus d’informations signifient une meilleure compréhension des facteurs, il repose sur une fondation commune, celle de la confiance. Le traitement de la donnée est un outil, intrinsèquement neutre, et ne prend sa valeur que dans l’utilisation que nous en faisons. Si les bénéfices de cette approche sont évidents, leur application auprès de secteur critiques, stratégiques comme l’infrastructure, le transport ou la santé nécessite d’en assurer le contrôle et la qualité. Pour les entreprises, l’enjeu est identique, celui de la confiance avec le public mais aussi celui des collaborateurs. Aujourd’hui plus de 80% des entreprises reconnaissent le caractère vital de ce partage de la donnée avec les partenaires et les collaborateurs, permettant non seulement de lutter contre l’effet silo si dangereux au sein de l’entreprise, mais bien aussi de favoriser le développement de l’innovation partagée.
La transparence dans la collecte et l’utilisation de la donnée est le marqueur qui permet non seulement de mesurer la digitalisation durable de l’entreprise, mais bien aussi sa capacité à en tirer les pleins bénéfices : résoudre et prévenir les problèmes d’un côté, créer de la valeur et de l’innovation d’autre part.
Nous avons passé un seuil technologique crucial dans l’histoire de la technique, celui de la démocratisation du traitement de la donnée, de la capacité pour chacun d’analyser et d’améliorer chaque étape de la chaîne de production.
Cette capacité nous permet non seulement d’en maximiser l’efficacité, elle nous permet aussi d’intégrer des dimensions jusqu’ici cachées et d’en comprendre le coût économique et sociétal à terme.
C’est grâce à cette connaissance que nous entrons dans un nouveau paradigme : celui de l’innovation permanente, où chaque nouvelle application crée la donnée nécessaire à sa propre amélioration, à sa propre croissance dans un monde durable.